Veille juridique octobre 2022

Chaque mois, le CAUE vous propose une veille juridique dans ses domaines de compétences, architecture, urbanisme et environnement. Elaborée par le juriste et l'ingénieure écologue du CAUE, elle donne une vision des dernières évolutions en matière de réglementation.

 

 

notion d'extension de construction existante

Plan Local d’Urbanisme, règlement
La Cour Administrative d’Appel (CAA) de Versailles considère qu'une extension quintuplant la surface de l'existant ne constitue pas une construction nouvelle, dès lors que le PLU ne limite pas la superficie des extensions susceptibles d'être autorisées.
Selon le lexique national d'urbanisme, « l’extension consiste en un agrandissement de la construction existante présentant des dimensions inférieures à celle-ci. L’extension peut être horizontale ou verticale, et doit présenter un lien physique et fonctionnel avec la construction existante ».
On retrouve dans cette définition les critères, constants en jurisprudence, qui permettent de distinguer les simples travaux d'extension de ceux emportant construction nouvelle, à savoir la situation, la complémentarité et la proportion de surface. C'est ce dernier critère que la formation plénière de la CAA de Versailles vient bousculer.

Il s’agissait d’un Permis de Construire (PC) autorisant un projet d'extension qui portait la surface de plancher de l'habitation existante de 63 à 329 m². Au soutien de leur recours, les requérants faisaient valoir une méconnaissance de certaines dispositions du PLU applicables aux constructions nouvelles. Pour écarter l'argument et valider le projet, les juges versaillais indiquent qu'une extension est « une construction qui présente un lien de continuité physique et fonctionnelle avec la construction existante dont elle constitue le prolongement. La superficie d'une extension ou sa proportion par rapport à cette construction existante ne peuvent être encadrées que par des dispositions législatives ou réglementaires spécialement applicables à ces travaux, en particulier les règles locales d'urbanisme ».
Sauf qu’aucune disposition du Code de l'urbanisme ni du PLU ne limitait la surface des extensions susceptibles d'être autorisées dans la commune. De plus, l'extension et la surélévation autorisées étaient bien prévues dans le prolongement et en continuité de l'existant. En conséquence, les travaux s’apparentaient donc bien à une extension d'une construction à usage d'habitation existante et non une construction nouvelle, compte tenu de la complémentarité du projet d'extension avec la maison existante et de leur lien de continuité physique et fonctionnelle.

CAA Versailles 30 sept. 2022, n° 20VE02243

 

Comment réduire un emplacement réservé au PLU ?

Plan Local d’Urbanisme, emplacement réservé
Le règlement d'un PLU peut délimiter des terrains sur lesquels sont institués des servitudes d'emplacements réservés destinés notamment la réalisation de voies et d'ouvrages publics, d'installations d'intérêt général ou d'espaces verts à créer ou à modifier ou encore d'espaces nécessaires aux continuités écologiques (art. L. 151-41 du Code de l’urbanisme). Ces emplacements réservés apparaissent à la fois dans la partie écrite et dans la partie graphique du règlement du PLU, ce qui conditionne leur opposabilité.

Si l'emprise d'un emplacement réservé est réduite après accord entre le propriétaire du terrain grevé par l'emplacement réservé et la collectivité bénéficiaire de celui-ci, le règlement du PLU qui l'a institué ainsi que le document graphique qui l'a délimité doivent évoluer afin de rendre opposable la nouvelle délimitation de l'emplacement réservé. La simple mention d'un protocole d'accord entre les parties est insuffisante pour créer des effets. L'évolution du PLU peut prendre la forme d'une procédure de modification simplifiée, en application des dispositions de l'article L. 153-36 du Code de l'urbanisme, sous réserve des cas où une révision ou une modification de droit commun s'impose en vertu des articles L. 153-31 et L. 153-41 du Code de l'urbanisme.

Rép. min. n° 1832-JO Sénat Q, 6 oct. 2022

 

Un marché public peut être attribué à un agent dans sa commune

Marché public
A la suite d’un avis d’appel public à la concurrence ouvert selon la procédure adaptée pour un marché public de prestation de collecte de déchets sur le territoire d’une commune, un agent de cette commune s’est porté candidat en tant qu’auto-entrepreneur et s’est vu attribuer le marché. Mais un candidat évincé a contesté cette attribution et saisi la juridiction administrative pour demander l’annulation de ce marché et l’indemnisation de ses préjudices. En l’espèce, le candidat évincé, auteur du recours initial, estimait que l’attribution du marché en cause méconnaissait les règles de cumul d’activité dans la fonction publique car le candidat retenu travaillait pour la commune sur le territoire de laquelle le marché devait être exécuté. Or, les juges ont relevé que cela était sans rapport avec le motif d’éviction de ce candidat. En effet, c’est parce que son offre n’était pas économiquement la plus avantageuse qu’il n’avait pas été retenu. Il ne pouvait donc pas contester le marché sur ce point.

En outre, les juges de la Cour Administrative d’Appel de Bordeaux (CAA) ont indiqué qu’aucune disposition du Code des marchés publics n’interdit à un fonctionnaire ou agent public de candidater à une procédure de mise en concurrence. Le candidat évincé estimait que les fonctions d’agent territorial au sein de la commune exercées par le candidat retenu étaient de nature à rompre l’égalité entre les candidats.
Mais cet argument a été écarté par les juges de la CAA de Bordeaux dans la mesure où la Communauté de Communes (CdC) adjudicatrice, EPCI, est une personne morale distincte de la commune en question. Par ailleurs, aucun élément du dossier ne permettait d’estimer que la qualité de fonctionnaire ou les fonctions d’agent territorial qu’il exerçait auraient placé le candidat retenu dans une situation privilégiée de nature à l’avantager.
En conséquence, la CAA de Bordeaux a accepté la demande de la CdC et annulé le jugement rendu en première instance. La décision d’attribution du marché à un agent de la commune a ainsi été validée.

CAA Bordeaux, 4 oct. 2022, n°20BX02326    

Un arrêté refusant un projet doit préciser quelles atteintes au paysage ont motivé le refus

Permis de Construire, Règlement National d’Urbanisme
Dans cette commune, le maire a refusé de délivrer à un couple un Permis de Construire (PC) en vue de la démolition d’une construction existante et de l’édification sur leur parcelle d’une maison d’habitation individuelle.
L’article R. 111-27 du Code de l’urbanisme prévoit que : « Le projet peut être refusé ou n’être accepté que sous réserve de l’observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l’aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l’intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu’à la conservation des perspectives monumentales ».
De plus, l’article UE 11 du règlement du PLU de la commune prévoit que : « Les constructions, bâtiments et ouvrages à édifier ou à modifier, ne doivent pas par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l’aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier porter atteinte au caractère ou à l’intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu’à la conservation des perspectives, en particulier à proximité des bâtiments remarquables identifiés au plan de zonage ».
Le juge relève que les dispositions de l’article UE 11 du règlement ont le même objet que celles de l’article R. 111-27 du Code de l’urbanisme et posent des exigences qui ne sont pas moindres que celles résultant de cette disposition. Dès lors, c’est par rapport aux dispositions du règlement du PLU que doit être appréciée la légalité de l’autorisation d’urbanisme en litige.

Le juge souligne que l’autorité administrative doit apprécier, dans un premier temps, la qualité du site sur lequel la construction est projetée et d’évaluer, dans un second temps, l’impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site.
Ici, l’autorité administrative n’a pas procédé à l’appréciation de la qualité du site et des lieux avoisinants pour en faire apparaître les caractéristiques auxquelles le projet aurait porté atteinte. Ce qui ne permet donc pas de connaître quels éléments du projet ont conduit l’auteur de la décision attaquée à refuser de délivrer le PC demandé en se fondant sur le motif tiré de l’atteinte au site et au paysage urbain environnant. Par suite, les requérants sont fondés à soutenir que l’arrêté litigieux est entaché d’une erreur de droit dans l’application des dispositions de l’article UE 11 du règlement du PLU.

CAA Versailles, 28 avr. 2022, n°20VE01450

 

Obligation de réaliser des places de stationnement et calcul de la distance de 500 m d'une gare

Plan Local d’Urbanisme, règlement
Le plafonnement des obligations de réaliser des places de stationnement à proximité d'une gare ou d'une station concerne les projets situés à l'intérieur d'un rayon de 500 m à vol d'oiseau.
Les PLU comportent généralement des règles imposant la réalisation de places de stationnement. Le législateur a souhaité limiter les exigences pour les logements, en particulier pour certaines catégories et dans certains secteurs géographiques. Dans cet arrêt, le Conseil d'État précise les modalités d'application des plafonds institués pour les constructions réalisées à proximité des transports collectifs.
Le Code de l'urbanisme, en plus de prévoir la possibilité de ne pas imposer la réalisation d'aires de stationnement pour les logements sociaux, les établissements assurant l'hébergement des personnes âgées et les résidences universitaires, fixe également des plafonds qui sont applicables nonobstant les dispositions du PLU.
Ainsi, pour ces constructions, il ne peut être exigé la réalisation de plus d'une aire de stationnement par logement. Ce plafond est divisé par deux (soit une place pour 2 logements) lorsque les logements sont situés à moins de 500 mètres d'une gare ou d'une station de transport public et que la qualité de la desserte le permet (Code de l’urbanisme, art. L. 151-35).
Pour les autres constructions à usage d'habitation situées à moins de 500 m d'une gare, le plafond est fixé à une aire de stationnement par logement (Code de l’urbanisme, art. L. 151-36).

Le Conseil d’Etat précise les modalités de calcul de cette distance. Sont ainsi considérés comme situés à moins de 500 m d'une gare ou d'une station de transport, les projets se trouvant dans un rayon de 500 m à vol d'oiseau de cette gare ou station.
En l'espèce, le projet comportant 30 logements en accession à la propriété et neuf logements locatifs sociaux, situé dans un rayon de 500 m d'une station de métro, ne pouvait se voir imposer la création d'un nombre de places supérieur aux 34 requises.

CE, 10 oct. 2022, n° 452955

 

Un lotissement relevant du régime déclaratif n'est pas un aménagement

Lotissement, autorisations d’urbanisme
En l’espèce, le maire d’une commune avait pris deux arrêtés de non-opposition à des Déclarations Préalables (DP) effectuées en vue de la création de lots à bâtir. Une association de défense de l’environnement demandait l’annulation de ces décisions au motif que les déclarations auraient dû être accompagnées d’une étude d’impact du projet.

Selon les dispositions prévues par le Code de l’environnement, les opérations d’aménagement peuvent faire l’objet d’une évaluation environnementale, à titre obligatoire ou après un examen au cas par cas, lorsqu’elles excèdent par leurs caractéristiques les seuils posés par la rubrique 39 de la nomenclature annexée à l’article R. 122-2 du même code. Les lotissements, qui ne sont plus visés expressément par la nomenclature depuis la réforme issue du décret n°2011-1110 du 11 août 2016, peuvent être assujettis à évaluation environnementale en étant assimilés à cette catégorie de projet.
Toutefois, cette correspondance entre lotissement et opération d’aménagement n’est pas évidente pour la CAA de Bordeaux. Dans cet arrêt rendu sous l’empire du droit antérieur à la réforme de 2016, mais transposable, elle estime que cette qualification ne s’applique pas aux lotissements soumis à DP, qui ne prévoient pas la création de voies ou équipements collectifs.

La Cour relève que l’opération, qui vise à détacher deux parcelles d’une unité foncière en vue d’y faire réaliser des constructions, constitue bien un lotissement au sens de la définition prévue par le Code de l’urbanisme. Dans sa version applicable au litige, la rubrique 33 de la nomenclature annexée à l’article R. 122-2 du Code de l’environnement soumettait à étude d’impact les « travaux et aménagements situés dans un lotissement » lorsque l’opération créait une surface de plancher supérieure ou égale à 40 000 m² ou que son terrain d’assiette couvrait plus de 10 hectares.
Toutefois, selon la cour, ces critères ne peuvent s’appliquer à l’opération contestée dans la présente affaire, dans la mesure où elle ne comporte pas « d’aménagements » au sens de l’article L. 300-1 du Code de l’urbanisme. En effet, le projet ne portait que sur une division foncière et ne conduisait pas à la création de de voies, d’espaces ou d’équipements communs, sans quoi il n’aurait pas été soumis à déclaration préalable mais aurait nécessité l’obtention d’un permis d’aménager.

La CAA de Bordeaux en conclut que, faute d’aménagements, l’opération, au même titre que tous les lotissements soumis à régime déclaratif, ne relève pas du champ d’application de la rubrique 33 de la nomenclature.

Actuellement, cette distinction entre opérations de lotissement pourrait toujours s’appliquer car la rubrique 39 de la nomenclature sur l’évaluation environnementale vise de manière générale toutes les « opérations d’aménagement » au sens de l’article L. 300-1 du Code de l’urbanisme.
De toute manière, une évaluation environnementale sera toujours possible au titre de la « clause-filet » depuis le 27 mars 2022, puisque l'autorité compétente peut décider de soumettre un projet à un examen au cas par cas dès lors qu'il lui apparaît susceptible d'avoir des incidences notables sur l'environnement ou la santé humaine au regard des critères définis en annexe de l'article R. 122-3-1 du Code de l’environnement. Les lotissements soumis à DP ne sont donc pas dispensés automatiquement de toute évaluation environnementale.

CAA Bordeaux 28 sept. 2022, n°20BX01551    

 

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