Veille juridique août 2020

Chaque mois, notre juriste-conseiller réalise une veille juridique sur les modifications des lois impactant nos domaines de compétences (urbanisme, architecture, environnement, habitat, etc.).  Ce mois-ci, entres autres, la garantie constructeur ou encore la légalité d'un PLU.

 

 

 

Retrait-gonflement argileux : la réglementation se précise

Depuis le 1er janvier 2020, la réalisation d’études de sol est obligatoire en cas de vente de terrain pour la construction de maisons en zones à risque argile moyen ou fort.
Une série de trois arrêtés, publiés courant août, vient compléter l’arsenal réglementaire pris en application de la loi Elan pour réduire le nombre de sinistres liés au « phénomène de mouvement de terrain différentiel consécutif à la sécheresse et à la réhydratation des sols argileux ».
Un premier arrêté précise le contenu des études géotechniques à réaliser à la vente d’un terrain nu à bâtir et au moment de la construction. Son objet est de fixer « les prescriptions constructives adaptées à la nature du sol et au projet de construction, en tenant compte des recommandations énoncées lors de l'étude géotechnique préalable et en réduisant au mieux les risques géotechniques identifiés et jugés importants, en particulier le risque de mouvement de terrain différentiel consécutif à la sécheresse et à la réhydratation des sols », précise le texte.
Le second arrêté précise les critères méthodologiques sur lesquels est effectuée la définition des zones exposées au risque (aléa moyen et fort) où s’appliquent les nouvelles dispositions réglementaires. Il officialise en réalité le zonage proposé par la carte d'exposition publiée depuis janvier 2020 sur Géorisques.
Un dernier arrêté définit quant à lui les techniques particulières de construction permettant d’améliorer la résistance des bâtiments (fondations renforcées, choix des matériaux, gestion des écoulements, éloignement de la végétation…).

Cf. arrêté du 22 juillet 2020 définissant le contenu des études géotechniques à réaliser dans les zones exposées au phénomène de mouvement de terrain différentiel consécutif à la sécheresse et à la réhydratation des sols ; arrêté du 22 juillet 2020 définissant les zones exposées au phénomène de mouvement de terrain différentiel consécutif à la sécheresse et à la réhydratation des sols argileux ; arrêté du 22 juillet 2020 relatif aux techniques particulières de construction dans les zones exposées au phénomène de mouvement de terrain différentiel consécutif à la sécheresse et à la réhydratation des sols.

La légalité du futur PLU peut être contestée lors d'un recours contre un sursis à statuer

En l'espèce, un pétitionnaire sollicite un Permis de Construire (PC) pour la réalisation d'une maison individuelle et un garage. Le maire lui oppose un sursis à statuer au motif que l'opération projetée est de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur PLU. Le pétitionnaire saisit le juge administratif pour obtenir l'annulation du sursis.
Le Tribunal Administratif rejette la demande, mais la cour administrative d'appel y fait droit, examinant au passage la légalité du classement opéré par le projet de PLU. La commune se pourvoit alors en cassation.
Le Conseil d’Etat permet désormais au pétitionnaire de soulever l'exception d'illégalité du PLU en cours d'élaboration lors du recours formé contre le sursis à statuer opposé à sa demande de permis.
La Haute juridiction précise qu'un tel sursis « ne peut être opposé à une demande de permis de construire qu'en vertu d'orientations ou de règles que le futur plan local d'urbanisme pourrait légalement prévoir, et à la condition que la construction, l'installation ou l'opération envisagée soit de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse son exécution ». Il ouvre ainsi la question de la légalité des dispositions du PLU sur lesquelles se base l'autorité compétente pour opposer un sursis.

Cf. CE, 5 août 2020, n° 436940

Construction illicite : la démolition peut être ordonnée à la demande d'une association

Le propriétaire d'une maisonnette située dans une zone protégée en Corse dépose une Déclaration Préalable (DP) à son extension. Le maire prend un arrêté de non-opposition, à la suite duquel le propriétaire effectue ses travaux. Mais une association locale de protection de l'environnement porte plainte : au lieu de l'extension projetée, le propriétaire a démoli la construction existante pour la remplacer par une maison plus grande, en violation du POS qui interdit toute démolition sans permis et n'autorise que les travaux de réhabilitation ou d'extension limitée dans cette zone.
Les juges déclarent le propriétaire coupable de l'infraction de travaux sans permis et en violation du POS et le condamnent à une amende de 20 000€ ainsi qu’à la démolition de la maison édifiée illégalement.
La Cour de cassation rappelle que les associations agréées de défense de l'environnement peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile pour les faits portant un préjudice direct ou indirect aux intérêts collectifs qu'elles défendent et qui constituent une infraction d'urbanisme ou environnementale. La remise en état des lieux permet de réparer le dommage environnemental causé par l’infraction, et elle est proportionnée au regard de la gravité de l’atteinte portée au site remarquable par la construction illicite.
La remise en état des lieux peut être prononcée par le juge pénal soit en tant que mesure de restitution, soit au titre de la réparation du dommage subi par la partie civile.
La démolition de l'ouvrage illégal est souvent réclamée sur ce dernier fondement par la commune concernée, mais elle peut également être demandée par une association exerçant l'action civile, ainsi que l'illustre cette décision.

Cf. Cass. crim. 23-6-2020 n° 19-81.106

Marchés publics de travaux : le seuil de dispense de procédure est temporairement relevé

En complément des diverses mesures prise en matière de commande publique pour relancer l'activité économique, le gouvernement a décidé de relever provisoirement à 70 000 euros HT le seuil de dispense de procédure pour la passation des marchés publics de travaux. En temps normal, ce seuil est fixé à 40 000 euros hors taxes par le code de la commande publique.
A compter du 24 juillet 2020 et jusqu'au 10 juillet 2021 inclus, les marchés dont la valeur estimée est inférieure à ce nouveau seuil pourront être conclus sans aucune formalité de publicité ou de mise en concurrence préalable. Ces dispositions sont applicables à tous les lots qui portent sur des travaux, à condition que le montant cumulé de ces lots n'excède pas 20% de la valeur totale estimée de l'ensemble des lots.
A l'image des dispositions de droit commun, le décret comporte une disposition visant à rappeler aux acheteurs qu'ils doivent veiller à choisir une offre pertinente, à faire une bonne utilisation des deniers publics et à ne pas contracter systématiquement avec un même opérateur économique lorsqu'il existe une pluralité d'offres susceptibles de répondre au besoin.

Cf. Décret n°2020-893, 22 juill. 2020 : JO, 23 juil.

Garanties des constructeurs : les clauses de non-recours réputées non écrites

Les parties ne peuvent stipuler dans un contrat de vente que l'acquéreur qui prend acte du bon état de fonctionnement du système d'assainissement individuel d'une maison d'habitation en fasse son affaire personnelle sans aucun recours contre quiconque.
En application de l’article 1792-5 du Code Civil, les parties ne peuvent exclure ou limiter la responsabilité décennale des constructeurs. Cette règle d’ordre public vient d’être reprise avec fermeté par la troisième chambre civile dans cet arrêt.
En l’espèce, l’acte notarié d’une vente de maison d’habitation avait stipulé que le bien était raccordé à un système d’assainissement individuel en bon état de fonctionnement, que l’acquéreur prenait acte de cette situation et qu’il voulait en faire son affaire personnelle sans aucun recours contre quiconque. Les acquéreurs, après constatation de dysfonctionnements du réseau d’assainissement, avaient assigné sur le fondement de la responsabilité décennale l’entrepreneur qui avait réalisé l’ouvrage. Leur demande avait été déclarée irrecevable à hauteur d’appel au motif que le litige qui portait sur le système d’assainissement avait fait l’objet d’une clause d’exclusion.
Cette décision a été cassée pour violation de l’article 1792-5 du Code Civil. La Cour de cassation considère que la clause qui avait pour effet d’exclure la garantie décennale des constructeurs devait être réputée non écrite.

Cf. Cass. 3e civ., 19 mars 2020, n° 18-22.983

Pas d'exception à l'obligation de publication sur le Géoportail de l'urbanisme

Il n'existe pas de régime dérogatoire qui permette aux collectivités élaborant des PLUi d'être exemptées de publier les documents d'urbanisme communaux qui continuent à évoluer jusqu'à l'approbation du PLUi.
Pour rappel, l'obligation de publication sur le Géoportail de l'urbanisme pour toute nouvelle version d'un document d'urbanisme approuvée à compter du 1er janvier 2020 a été inscrite dans le Code de l'urbanisme par l'ordonnance n° 2013-1184 du 19 décembre 2013 relative à l'amélioration des conditions d'accès aux documents d'urbanisme et servitudes d'utilité publique. Les communes et groupements compétents doivent ainsi transmettre à l'État sous format électronique la version en vigueur des SCoT, des PLU et des documents tenant lieu de carte communale.
Des solutions existent localement pour financer la numérisation des documents anciens, incomplets ou dans des formats incompatibles avec celui défini par le conseil national de l'information géographique (CNIG), ce format étant une condition nécessaire pour publier un document d'urbanisme sur le Géoportail de l'urbanisme.
Il est en outre primordial d'intégrer à tout marché passé avec un bureau d'études pour assister la collectivité dans la finalisation d'un document d'urbanisme, la numérisation au format défini par le CNIG des documents d'urbanisme.

Cf. Rép. min. n° 13091 : JO Sénat Q, 9 juill. 2020, p. 3167

Retour sur la combinaison entre plan de prévention des risques et règlement national d'urbanisme

Le Conseil d'État livre une méthodologie pour instruire les demandes d'autorisation déposées dans le périmètre d'un plan de prévention des risques naturels :

  • l'autorité compétente pour délivrer une autorisation d'urbanisme doit d'abord vérifier que le projet respecte les prescriptions édictées par le plan de prévention et, le cas échéant, préciser dans l'autorisation les conditions de leur application ;
  • si les particularités de la situation l'exigent, elle peut subordonner la délivrance du permis sollicité à des prescriptions spéciales, s'ajoutant aux prescriptions édictées par le plan de prévention dans cette zone, si elles lui apparaissent nécessaires pour assurer la conformité de la construction aux dispositions de l'article R. 111-2 du Code de l'urbanisme ;
  • l'administration ne peut s'opposer au projet en se fondant sur le RNU qu'en dernier recours, si elle estime qu'aucune prescription n'est susceptible de supprimer le risque d'atteinte à la sécurité publique, au vu d'une appréciation concrète de l'ensemble des caractéristiques de la situation d'espèce et du projet envisagé, prenant éventuellement en compte des éléments déjà connus lors de l'élaboration du PPRN.

En l'espèce, l'erreur de droit du tribunal réside dans le fait de s'être prononcé au seul regard des dispositions de l'article R. 111-2 du Code de l'urbanisme, sans rechercher si les prescriptions du plan de prévention avaient été respectées et n'étaient pas, à elles seules ou, le cas échéant, complétées de prescriptions spéciales, de nature à prévenir les risques d'atteinte à la sécurité publique.

Cf. Cass. 3e civ., 19 mars 2020, n° 18-22.983

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