Veille juridique mars 2021

Chaque mois, notre juriste-conseiller réalise une veille juridique concernant aussi bien le droit à construire que les autorisations d'urbanisme ou encore les réglementations en vigueur. Ce mois-ci, entre autres, le CCMI, la DAACT, l'assainissement, le Permis de Construire, etc.
 
 
 

CCMI : devoir de conseil du constructeur sur la nature et
l’importance des travaux de raccordement

Des particuliers concluent un Contrat de Construction de Maison Individuelle (CCMI) avec plan sous condition suspensive d’obtention de la garantie de livraison dans les 12 mois. Le constructeur n’obtient pas la garantie de livraison par une insuffisance de marge et de rentabilité de l’opération pour le constructeur.
Les maîtres de l’ouvrage assignent ce dernier en dommages-intérêts pour manquement à son devoir de conseil, lui reprochant de ne pas avoir pris en compte la situation enclavée de la parcelle, qui nécessitait la création d’une servitude de passage de canalisations, pour déterminer le coût réel du raccordement au réseau public.

Déboutés par la Cour d’Appel qui avait considéré que le coût du raccordement au réseau public a été pris en compte lors de la signature du contrat, l'affaire est portée devant la Cour de cassation, les maîtres de l'ouvrage invoquant à nouveau le devoir de conseil du constructeur, tenu de vérifier sur place l'existence de canalisations sur le terrain ou au moins, à proximité.

L’argument est cette fois entendu, les hauts magistrats cassent l’arrêt d’appel. Le constructeur de maison individuelle avec plan doit s’assurer de la nature et de l’importance des travaux de raccordement de la construction aux réseaux publics. Il doit vérifier sur place l’existence de canalisations sur le terrain ou au moins, à proximité.

La Cour de cassation précise ici l’étendue de l’obligation du constructeur concernant ces travaux de raccordement et, par ricochet, de son obligation de conseil à l’égard du maître de l’ouvrage. Le constructeur aurait dû anticiper, au regard de la configuration matérielle du terrain, la création de servitudes de canalisation, générant un surcoût.

Cf. Cass. 3e civ. 11-2-2021 n° 19-22.943

Précisions sur les modifications pouvant être apportées au projet de PLU après l'enquête publique

Pour rappel, entre la date de sa soumission à enquête publique et son approbation, le projet de PLU ne peut être modifié que pour tenir compte des avis qui ont été joints au dossier d'enquête, des observations du public et du rapport du commissaire enquêteur ou de la commission d'enquête. En outre, ces modifications ne doivent pas remettre en cause l'économie générale du projet et elles doivent procéder de l'enquête.

Le Conseil d'État précise que les modifications destinées à tenir compte des réserves et recommandations du commissaire enquêteur doivent être regardées comme procédant de l'enquête, même si aucune observation n'a été formulée par le public sur ce point au cours de l'enquête. Ainsi, les modifications susceptibles d'être apportées au projet peuvent résulter du travail du commissaire enquêteur, son rapport étant susceptible de fonder à lui seul des modifications.
Le deuxième point tranché par l'arrêt porte sur la possibilité pour une collectivité d'effectuer des modifications post enquête publique qui vont au-delà de ce qui est préconisé dans le rapport du commissaire enquêteur. De telles modifications s'avèrent possibles dès lors qu'elles ont un lien direct avec les recommandations.
A l'issue de l'enquête publique, la collectivité peut donc modifier le projet de PLU en suivant une recommandation du commissaire enquêteur, même en l'absence d'observation du public sur ce point. En outre, les modifications peuvent aller au-delà de ce qui est préconisé.

Cf. CE, 17 mars 2021, n° 430244

Le syndicat des copropriétaires est un voisin immédiat comme un autre

Un Permis de Construire autorisant la réalisation de trois immeubles d'habitation a été attaqué par le syndicat des copropriétaires de la résidence située sur la parcelle adjacente au projet. Pour justifier de son intérêt à agir, le syndicat faisait état de l'importance de l'opération qui consistait à créer 74 logements en vis-à-vis de la résidence ainsi que 124 places de stationnement.
Ces éléments ont été jugés insuffisants par le tribunal administratif de Marseille qui a prononcé l'irrecevabilité de la requête pour défaut d'intérêt à agir.
Ce jugement est censuré par le Conseil d'État en précisant que la qualité de « voisin immédiat » doit être reconnue au syndicat des copropriétaires de l'immeuble jouxtant le projet. En cette qualité, il bénéficie non pas d'une reconnaissance systématique de son intérêt à agir contre le permis de construire mais d'un allègement des justifications nécessaires à sa démonstration.
Ainsi, l'appréciation de l'intérêt à agir du « voisin immédiat » contre un PC fait l'objet d'un traitement privilégié qui bénéficie au syndicat de copropriétaires de l'immeuble jouxtant le projet.

Cf. CE, 24 févr. 2021, n° 432096

Quelles conséquences fiscales en cas de non-dépôt de la DAACT ?

L'article L.462-1 du Code de l'urbanisme prévoit qu'à l'achèvement des travaux de construction ou d'aménagement, une Déclaration Attestant cet achèvement, ainsi que la conformité des travaux (DAACT) par rapport à l'autorisation accordée, soit adressée à la mairie. Pourtant, il n'est pas rare que le pétitionnaire, volontairement ou pas, omette de procéder à cette formalité.
Alerté de ce problème, le ministère des comptes publics a fait le point sur les conséquences du non-dépôt des DAACT en termes de fiscalité locale.

La réponse ministérielle rappelle que pour permettre l'évaluation cadastrale de l'immeuble puis l'imposition aux taxes locales, le propriétaire doit en déclarer les caractéristiques dans les 90 jours de son achèvement au sens fiscal, au moyen d'un formulaire spécifique.
La date d'achèvement des travaux, au sens fiscal, s'entend de la date à laquelle la construction est habitable y compris lorsque des travaux accessoires (papiers peints, revêtement de sols, etc.) restent à effectuer. Ainsi, un immeuble peut être considéré comme achevé par l'administration fiscale bien qu'aucune DAACT n'ait été déposée en mairie par le propriétaire. Le dépôt, éventuellement tardif de la DAACT, n'a donc pas pour effet de déclencher le processus d'évaluation et d'imposition des biens, qui résulte du seul dépôt de la déclaration foncière.
Par ailleurs, conformément à l'article 1383 du CGI, un dépôt hors délai de la déclaration fiscale d'achèvement entraîne la perte, totale ou partielle, du bénéfice de l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties durant les deux années qui suivent celle de leur achèvement au sens fiscal, s'agissant des constructions nouvelles, reconstructions et additions de construction.
L'absence ou le dépôt tardif des déclarations d'achèvement et de conformité restent sans effet sur la fiabilisation des bases de fiscalité directe locale des communes.

Cf. Rép. min. n° 34828 : JOAN Q, 2 mars 2021

Faute d’assainissement conforme, le préfet bloque les Permis de Construire

Le préfet des Côtes d’Armor est le premier à conditionner les PC à la conformité des réseaux d’assainissement. Enjeu : éviter le contentieux européen et une amende de plusieurs millions d’euros. Plusieurs communes et intercommunalités de ce département sont concernées.

Au moins une vingtaine de communes des Côtes-d’Armor ont été informées que les services de l’Etat ne valideraient plus leurs Permis de Construire tant qu’elles ne se réaliseraient pas les travaux nécessaires pour la mise en conformité de leurs installations d’assainissement.
La préfecture des Côtes-d’Armor justifie son action sur une instruction du Gouvernement du 18 décembre 2020 relative à la collecte et au traitement des eaux urbaines résiduaires. Ce document de 33 pages présente aux préfets les « leviers législatifs et réglementaires leur permettant de veiller à ce qu’une autorisation d’urbanisme ne puisse intervenir que lorsque les conditions de collecte ou de traitement des eaux usées sont conformes à la réglementation en vigueur ». Il précise que « le contrôle de légalité des actes des communes et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) constitue un des instruments à votre disposition ».
L’instruction gouvernementale renvoie aussi à la coresponsabilité des collectivités en cas de contentieux européen. En effet, la loi NOTRe prévoit un partage de la responsabilité financière entre l’Etat, les collectivités territoriales et leurs groupements des condamnations pécuniaires décidées par la Cour de justice de l’Union européenne. La compétence assainissement incombant en l’espèce aux communes ou aux intercommunalités, l’article L.1611-10 du CGCT pourrait trouver à s’appliquer dans le cadre des contentieux relatifs à l’application de la DERU (Directive RElative au traitement des eaux Résiduaires Urbaines du 21 mai 1991).
Pour exemple, la non-conformité de la station d’épuration entraine sur toute la commune la suspension des PC nécessitant un raccordement au réseau, suspension qui pourrait durer un an à 18 mois, le temps que le dossier de la nouvelle station d’épuration soit instruit par les services de l’Etat.

 

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