Veille juridique décembre 2022

Chaque mois, le CAUE vous propose une veille juridique dans ses domaines de compétences, architecture, urbanisme et environnement. Elaborée par le juriste et l'ingénieure écologue du CAUE, elle donne une vision des dernières évolutions en matière de réglementation.

 

 

 

Une demande illégale de pièces complémentaires ne fait pas obstacle à la naissance
d'une décision tacite d'acceptation

Permis de Construire, Tacite
Par cette décision rendue le 9 décembre 2022, le Conseil d’Etat est venu opérer un revirement de jurisprudence important en matière d’instruction des autorisations d’urbanisme. Il s’agit d’une décision qui aura des répercussions importantes sur l’instruction des autorisations d’urbanisme et la pratique de demandes de pièces complémentaires non exigées par le Code de l’urbanisme.

C’est donc, 7 ans plus tard, un abandon de l’arrêt « Commune d’Asnières-sur-Nouère » de 2015 par laquelle le Conseil d’Etat avait jugé qu’une demande illégale de pièces complémentaires ne pouvait avoir pour effet de rendre le pétitionnaire titulaire d’une décision implicite favorable, par l’énoncé du principe suivant :  
« 5. Il résulte de ces dispositions qu'à l'expiration du délai d'instruction tel qu'il résulte de l'application des dispositions du chapitre III du titre II du livre IV du code de l'urbanisme relatives à l'instruction des déclarations préalables, des demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir, naît une décision de non-opposition à déclaration préalable ou un permis tacite. En application de ces dispositions, le délai d'instruction n'est ni interrompu, ni modifié par une demande, illégale, tendant à compléter le dossier par une pièce qui n'est pas exigée en application du livre IV de la partie réglementaire du code de l'urbanisme. Dans ce cas, une décision de non-opposition à déclaration préalable ou un permis tacite naît à l'expiration du délai d'instruction, sans qu'une telle demande puisse y faire obstacle. »
Le Conseil d’Etat a donc clairement jugé, d’une part, qu’il est impossible à l'administration de prolonger l’instruction d’une autorisation d’urbanisme en sollicitant des pièces non exigibles, ce qui était déjà précisé par l’article R. 423-41 du Code de l’urbanisme et, d’autre part, qu’une demande illégale de pièces complémentaires ne saurait avoir pour effet de paralyser la naissance d’une décision implicite d’acceptation, ce qui est nouveau.

Conseil d'Etat, 9 déc. 2022, n°454521

Pas de conférence intercommunale lorsque le PLU est achevé par l'EPCI

PLU, Compétence
L'organisation d'une conférence intercommunale rassemblant les maires des communes membres de l'établissement public ne s'impose qu'avant l'approbation d'un PLU intercommunal.
L'article L. 153-21 du Code de l'urbanisme, qui fixe les modalités d'approbation d'un PLU, envisage deux hypothèses. Il indique que le plan est approuvé à l'issue de l'enquête, après d'éventuelles modifications :

  • soit par l'organe délibérant de l'EPCI à la majorité des suffrages exprimés, après présentation lors d'une conférence intercommunale, des avis qui ont été joints au dossier, des observations du public et du rapport du commissaire ou de la commission d'enquête et, le cas échéant, après avis des communes sur le plan de secteur couvrant leur territoire ;
  • soit par le conseil municipal dans le cas prévu au 2° de l'article L. 153-8 du Code de l'urbanisme, c'est-à-dire lorsque la commune n'est pas membre d'un EPCI.

La question posée était la suivante : qu’en est-il lorsqu'un PLU communal est achevé par l'EPCI à la suite du transfert de la compétence PLU à l'intercommunalité ?
Ici, le conseil municipal de Montreuil avait prescrit la révision de son PLU, puis transféré la compétence PLU à Est Ensemble Grand Paris. Ce dernier avait arrêté puis approuvé le projet de plan. Un requérant en demandait l'annulation, basée notamment sur l’absence de conférence intercommunale.
La CAA de Versailles rejette le moyen et précise qu'il « résulte des dispositions précitées de l'article L. 153-21 du Code de l'urbanisme, éclairées par les travaux parlementaires préalables à leur adoption, que le législateur n'a entendu imposer l'organisation d'une conférence intercommunale rassemblant les maires d'un établissement public intercommunal qu'avant l'approbation d'un plan local d'urbanisme intercommunal ».

CAA Versailles 10 nov. 2022, n°20VE01764

La surface des lots d'un lotissement peut être ajustée par un simple Permis Modificatif

Lotissement, Permis Modificatif
Cependant, ces modifications ne doivent pas avoir pour objet d'étendre le lotissement en dehors du périmètre autorisé par le permis d'aménager initial.
Le Gouvernement a été interrogé sur la possibilité de recourir au Permis Modificatif pour un lotisseur ayant bénéficié d’un permis d’aménager et qui constaterait, au moment de déposer les dossiers de PC, des erreurs dans les surfaces des lots.

Le ministre de la transition écologique a répondu par l’affirmative, estimant que de simples ajustements dans la superficie des lots n’étaient pas susceptibles de transformer radicalement un projet de lotissement. Il a précisé, cependant, qu’il ne saurait être question d’étendre par un permis modificatif le lotissement au-delà du périmètre autorisé dans le permis d’aménager initialement délivré. Dans ce dernier cas, la modification revient à créer un nouveau lotissement et requiert donc une nouvelle demande d’autorisation, conformément aux dispositions prévues par le Code de l’urbanisme (C. urb., art. R.421-19 a et R.421-23 a).

Rép. min. n°01919 : JO Sénat Q, 1er déc. 2022, p. 6175

Hausse significative du tarif de la redevance d'archéologie préventive pour 2023

Taxe, Fiscalité
Le tarif de la Redevance d’Archéologie Préventive (RAP) perçue sur les travaux soumis à étude d'impact (évaluation environnementale) et sur les affouillements est à la hausse pour la sixième année consécutive.
A compter du 1er janvier 2023 il passe à 0,64 €/m² (contre 0,60 €/m² en 2022).

Arr. 21 déc. 2022, NOR : MICC2236733A

Infractions aux règles d'urbanisme : jusqu'où peut aller la mise en demeure administrative ?

Construction illégale, Régularisation, Mise en conformité, Infraction
Le Conseil d’État vient ici expliciter la portée des articles L. 481-1 à L. 481-3 du Code de l’urbanisme. Ces dispositions, issues de loi Engagement et proximité, ont doté les autorités en charge de la délivrance des autorisations d'urbanisme de nouvelles prérogatives pour contraindre à la régularisation l'auteur d'une infraction au Code de l'urbanisme.

L'article L. 481-1 du Code de l'urbanisme peut jouer dès lors qu'a été dressé un procès-verbal constatant que des travaux ont été entrepris ou exécutés irrégulièrement. Il permet à l'autorité de délivrance de mettre en demeure l'intéressé, après avoir recueilli ses observations, soit de solliciter l'autorisation ou la déclaration nécessaire à une régularisation, soit de procéder aux opérations assurant une mise en conformité des travaux avec les dispositions méconnues. Cette mise en demeure peut être assortie d'une astreinte, prononcée dès l'origine ou à tout moment après l'expiration du délai imparti par la mise en demeure, s'il n'y a pas été satisfait. Dans ce dernier cas, une nouvelle procédure contradictoire préalable doit être organisée.
Dans cet arrêt, le Conseil d’État tranche une question importante relative aux mesures que l’administration peut réclamer à l’auteur des travaux dans le cadre de ce dispositif.

Ici, un procès-verbal d'infraction avait été dressé au titulaire d'une non-opposition à DP qui avait construit en zone agricole, en méconnaissance de sa déclaration, un mur plein d'une hauteur de 2 mètres ainsi qu'un panneau solaire, tous deux interdits par les dispositions du PLU.
Sur le fondement de l'article L. 481-1 du Code de l'urbanisme, le maire l'avait mis en demeure de démolir partiellement le mur réalisé et d'enlever le panneau solaire. Face à l'inertie du propriétaire, un arrêté prononçant une astreinte de 100 € par jour avait été pris à l'issue du délai d'un mois imparti par la mise en demeure. Saisi d'un référé-suspension dirigée contre cet arrêté, le TA de Montpellier avait fait droit à la demande du requérant. Conformément à l'interprétation majoritaire des juges de première instance, le juge des référés avait en effet considéré que les mesures prescrites au titre de l’article L. 481-1 du Code de l'urbanisme ne pouvaient comprendre la démolition d’un ouvrage, même partielle, laquelle ne pouvait être ordonnée, sauf dispositions législatives contraires, que par une décision du juge judiciaire.
Le Conseil d’État censure cette décision pour erreur de droit. Il précise que la mise en demeure peut ordonner à son destinataire de mettre la construction ou les travaux en cause en conformité avec les dispositions dont la méconnaissance a été constatée, y compris, si la mise en conformité l'impose, en procédant aux démolitions nécessaires. Une telle mesure figure parmi celles que l'autorité compétente peut prescrire sous astreinte sur le fondement de l’article L. 481-1 du Code de l’urbanisme, à défaut de régularisation et dans la mesure nécessaire à la mise en conformité des travaux irréguliers.

CE, 22 déc. 2022, n° 463331

 

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